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Sur la piste du domaine du Martreil…

À l’entrée de Sainte-Christine-en-Mauges, on peut apercevoir les hauts d’un château caché au milieu de bois. Quand on emprunte le chemin y accédant, se dessine alors le domaine du Martreil avec ses quinze hectares de parc, trente hectares de bois et ses deux étangs. Un lieu caché qui fait partie du patrimoine local par son histoire et par celle des habitants des Mauges. Rencontre avec les propriétaires du domaine du Martreil, Patrick et Hélène de Romans.

Quelle est l’histoire du Martreil ?

Patrick de Romans : « Notre aïeul Emmanuel Clémenceau de La Lande, industriel de Montjean-sur-Loire, a acheté la terre du Martreil en 1837. À l’époque, il y avait une grande maison bourgeoise à la place du château qui avait appartenu à un sénéchal du Roi René, et ensuite, petit à petit, à des tas de propriétaires successifs, dont un maire d’Angers au XVIIIe siècle. C’est Emmanuel Clémenceau de La Lande qui entreprend l’élévation du château, la construction des dépendances et la conception et plantation du parc. Le château s’est construit sur une trentaine d’années, entre 1850 et 1880. Pour le parc, il a notamment fait venir des arbres exceptionnels pour l’époque qui venaient d’Amérique ! »

Hélène de Romans : « Nous pouvons d’ailleurs rattacher l’histoire du Martreil à l’Histoire de France. Après l’engouement de la France pour la guerre d’indépendance américaine, le Nouveau Monde faisait rêver ! Le parc du Martreil est lié à cette expérience ramenée par les immigrés d’Angleterre, mais a aussi été inspiré par le Siècle des Lumières et notamment par les écrits de Jean-Jacques Rousseau. »

P. de Romans : « C’est vrai. Avant les parcs étaient plutôt des jardins à la Française, très rigides, très disciplinés, avec des murs. Et là on fait tomber les murs et on invite la nature sauvage, telle qu’elle était à l’origine à rentrer dans le parc. À l’époque, les aristocrates de l’Ancien Régime avaient tout perdu. Une nouvelle classe a émergée, acquise aux idées nouvelles, tout en étant fidèle et fascinée par la Royauté. Le courant d’un retour à la nature de Jean-Jacques Rousseau et puis le départ d’une nouvelle agriculture moderne sont nés. Et il y a eu un essor extraordinaire donné à l’agriculture, notamment en Maine-et-Loire. C’est pour cela qu’on est au coeur d’un parc agricole, et non pas d’un parc de loisirs et d’agrément. »

Pour vous, c’est quoi le patrimoine des Mauges ?

H. de Romans : « C’est l’histoire et les gens. Alors que dans d’autres endroits, cela va plutôt être l’architecture et la pierre par exemple. C’est immatériel, c’est fait de beaucoup de souvenirs et d’énergies. Mais ce sont aussi des particularités : un bocage encore très préservé et une nature particulière très façonnée par le passé. Les Mauges, c’est aussi un très beau patrimoine agricole. »

Comment Le Martreil s’inscrit dans ce patrimoine des Mauges ?

H. de Romans : « Il fait partie de l’histoire. Il est au carrefour de plusieurs courants : historique, industriel, etc. Il est ouvert et à découvrir. Il est fait de l’histoire des gens. Il n’a pas un intérêt architectural particulier, mais il a un ancrage très fort dans l’histoire. Mais tout est caché dans les Mauges, tout est à découvrir. Les villages, les fermes, les gens, avec les chemins creux, étaient cachés. Le Martreil est à découvrir. Même son histoire est cachée. Le patrimoine des Mauges est caché, plus qu’ailleurs. L’histoire des Mauges, c’est une histoire cachée. »

P. de Romans : « En tant que Maugeois de coeur, je regrette que mon histoire et que mon patrimoine soit caché. J’aimerais qu’elle soit connue de tout le monde. Déjà chez nous, avant de la faire connaître ailleurs. Je pense notamment aux enfants des petites communes des Mauges. Comment leur faire connaître leur histoire ? Cela ne fait pas partie de l’histoire officielle. »

H. de Romans : « Aujourd’hui, on est envahi par l’information nationale, internationale au détriment de la transmission orale sur l’histoire du territoire. On perd ses racines, son identité locale. Il faut veiller à transmettre sinon on a une perte d’identité. Il ne faut cependant pas être dans le passé, dans le regret. Il faut connaître le passé et le transmettre avec les outils d’aujourd’hui. »

Comment Le Martreil peut-il être davantage connu ?

H. de Romans : « Ici, au Martreil, on peut venir et ne rien voir. Il faut venir, être à l’écoute, chercher, être réceptif. C’est un parcours initiatique avec des indices. Et il faut faire parler ces indices. On pourrait, par exemple, très bien imaginer que des gens se promènent en faisant un reportage en se posant tout un tas de questions sur le parc du Martreil. Et avec eux, on reconstitue l’histoire à partir d’indices. Il faut qu’on sorte de nos schémas. Il faut être dans la créativité, il faut imaginer quelque chose de complètement nouveau. Il faut que les gens soient acteurs, et que ce soit tout public et intergénérationnel. On serait prêt à servir de laboratoire pour quelque chose de complètement neuf dans l’appropriation du château. On est preneur pour diversifier notre public. On voudrait qu’ici il se passe toujours plein de choses. On a envie de connaître les gens et de leur faire connaître Le Martreil. Il y a 1000 choses à faire ! Mais il faut faire preuve de modernité. Nous ne sommes pas propriétaires exclusifs, mais dépositaires, transmetteurs. Notre esprit, c’est faire découvrir, partager cet endroit et son histoire. Car Le Martreil, c’est un livre et les gens aiment les histoires. »

Comment qualifierez-vous Le Martreil ?

H. de Romans : « Emblématique ! Il est emblématique de ce que peut être un château aujourd’hui au XXIe siècle. Il est emblématique par son potentiel d’évocation. Il est emblématique de ce que les propriétaires doivent avoir à l’esprit. C’est un lieu inspirant qui est à tout le monde. Et nous sommes toujours vigilants aux choses qui font le Martreil, c’est-à-dire la beauté, la continuité, l’histoire, à la fois la simplicité et l’élégance, l’harmonie… ».

Patrick et Hélène de Romans sont arrivés au Château du Martreil en 2017. « Cela faisait des années qu’il ne se passait rien. C’était le château de la Belle au Bois Dormant. Avant notre arrivée, personne ne connaissait le Martreil. En quatre ans, nous avons dépensé beaucoup d’énergie pour le faire connaître. » explique Mme de Romans. « Cet endroit ira à nos enfants et on veut leur laisser un bel outil, pour qu’il y ait une suite. On ne veut pas leur transmettre seulement des ardoises à remplacer… Ici, il y a tout ce qu’il faut : du courage, de l’entrepreneuriat, de la solidarité… C’est une école de la vie. Ce n’est pas pour un retour au passé, mais c’est capitaliser sur l’histoire et les valeurs pour les transposer dans la modernité. Et c’est ce qu’ont toujours su faire les Mauges. Il y a tout ici pour avoir une valeur d’exemplarité. » conclue-t-elle. Aujourd’hui, M. et Mme de Romans espèrent que la situation sanitaire va s’améliorer afin de pouvoir rouvrir leur domaine au public, et ainsi, continuer à le faire rayonner dans les Mauges et bien au-delà.

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